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La santé n'est pas un droit
25 avril 2007

Santé, le "parler vrai" s'impose

Quelle pauvreté d'idées ! Quelles craintes de dire le vrai ! Quelles banalités délivrées sans risques ! Les candidats ont-ils peur d'afficher publiquement l'urgence de la rénovation d'un système de protection sociale et sanitaire qui hoquette dans ses derniers soupirs !

Après soixante ans de Sécurité sociale, cinquante ans de réforme hospitalière et de multiples conventions avec les médecins libéraux, on improvise toujours une pseudo-organisation sanitaire au gré de plans de rétablissements des comptes de la Sécurité sociale concoctés à

la va-vite. Les

données chiffrées sont toujours désastreuses à l'arrivée d'un ministre ; mais, grâce aux bonnes fées, bien meilleures à son départ. On cajole les syndicats, on rajoute à la dernière minute quelques sous aux professionnels qui râlent. Où est la politique dans ce mouvement brownien sanitaire ?

Les projets annoncés dans ces colonnes à l'occasion de l'élection présidentielle sont inaudibles et sans saveur. On saupoudre pour faire plaisir aux lobbys. Ah ! Surtout ne pas oublier les obèses, parler du sida, pleurer sur l'euthanasie, toucher le paralytique, nouveau cérémonial des écrouelles en numérique, rassurer sur la fermeture de certains services de chirurgie et de maternité en faisant croire que l'on y échappera. Or, plus on traîne, moins les réformes structurelles dont le pays a besoin auront une chance de voir le jour. A quelles questions les finalistes devront-ils répondre d'ici au deuxième tour ?

D'abord, à celle qui déterminera les chances de réussite des différentes mesures retenues qu'elles soient populaires ou non ? Ensuite : êtes-vous prêts à revoir la notion de plus en plus creuse de "médecine libérale" pour lui substituer celle "de médecine libre", qui passe par un véritable exercice médical et paramédical avec sa tête et ses mains (écouter, examiner) au lieu de privilégier le financement de techniques dont beaucoup ont une utilité discutable et ne nécessitent plus un diplôme de doctorat d'Etat en médecine pour les accomplir.

DÉSERTIFICATION SANITAIRE

Oserez-vous demander aux professionnels de pratiquer là où les besoins existent et non pas là où ils le veulent ? Arrêterez-vous de répondre aux élus qui se plaignent d'une désertification sanitaire, discutable aussi, par une augmentation inutile du nombre d'étudiants en médecine ? Sélectionnerez-vous dès l'entrée en première année les mêmes étudiants sur des bases correspondant aux qualités requises pour le métier ? Raccourcirez-vous la durée des études médicales en les adaptant au métier ? Regrouperez-vous ou spécialiserez-vous les centres hospitalo-universitaires, trop nombreux et dispersés pour assurer une recherche compétitive ? Décréterez-vous la fin du professorat à vie, et reconnaîtrez-vous l'impossibilité d'exercer les trois missions de

la réforme Debré

de 1958 de soins, d'enseignement et de recherche dans le même temps par un même médecin ? Saurez-vous arrêter, sans états d'âme, l'afflux de médecins à diplômes étrangers non contrôlés pour remplir des postes dans des hôpitaux sans malades ?

En revanche, aurez-vous les moyens d'attirer les meilleurs chercheurs, médecins et chirurgiens étrangers dans nos établissements ? Proposerez-vous des modes de rémunération autres, évitant les effets pervers des honoraires et du salariat, reconnaissance financière de haut niveau sous la forme d'un contrat d'exercice global renouvelable et évalué régulièrement ? Donnerez-vous de nouvelles missions et les moyens aux hôpitaux et aux cliniques selon leur niveau d'établissement de proximité, de recours ou de formation ?

Et renforcerez-vous la convergence entre le secteur hospitalier et le secteur libéral, une délétère dualité tant médicale qu'économique ? Saurez-vous imposer la transparence de l'information sur la qualité des soins et leur prix aux malades et opérés ? Saurez-vous interdire les arrêts de travail abusifs et autres triches au quotidien ? Financerez-vous à hauteur de leurs enjeux l'éducation sanitaire et la prévention ? Aurez-vous le courage de favoriser la refonte de notre industrie médicale sans laquelle les médecins, comme les chirurgiens, ne peuvent agir ? Changerez-vous la représentativité des partenaires qui gèrent les 160 milliards d'euros de l'assurance-maladie selon des modes de pensée dépassés ?

Finalement, saurez-vous faire vivre au quotidien, de la capitale au hameau le plus reculé, ce bien le plus précieux que nous avons perdu, la solidarité, et qui, au fil du temps, s'est muée en assistance inefficace et coûteuse ? Une dernière supplique : ne promettez plus de combler le trou de la Sécurité sociale. De grâce, changez plutôt vos schémas d'analyse obsolètes. Comprenez que l'économie de la santé et l'industrie des soins sont parmi les chances de la France dans l'Europe.

Le Monde, 26 avril 2007

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